Certaines espèces de papillons affichent des motifs sur leurs ailes qu’ils utilisent pour se camoufler visuellement des prédateurs. Alors pourquoi le papillon lune (Actias luna), qui est une créature nocturne, arbore une aussi belle trainée ? Les scientifiques ont suggéré que les queues uniques de ces papillons sont une sorte de camouflage acoustique, les aidant à tromper les prédateurs comme les chauves-souris qui s’appuient sur le son (écholocation) pour chasser et naviguer.
Cette dernière recherche s’appuie sur une étude de l’université d’état de Boise (Idaho), publiée l’an dernier, démontrant que les grandes chauves-souris brunes capturent plus facilement les papillons lune qui ont perdu leur queue. Les scientifiques de l’université de Washington et de l’université Johns Hopkins ont entrepris d’explorer plus en détail l’acoustique liée au phénomène afin d’obtenir des indices sur la raison pour laquelle cela pourrait être le cas.
D’abord, ils ont retenu par un fil des papillons lunes, limitant ainsi leur espace de vol. Ensuite, ils ont diffusé des ondes sonores à haute fréquence imitant les impulsions ultrasoniques utilisées par les chauves-souris et les sons/ échos ont rebondi sur le corps des insectes qui étaient suivis par des microphones placés à environ 2 m de chacun. Cela leur a permis de simuler "la vue" d’une chauve-souris du nuage de son résultant des échos réfléchis.
Représentation de l’expérience (Wu-Jung Lee/ université de Washington[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Vidéo tirée de l’étude, le cercle jaune devient solide lorsque l’ultrason est actif. Les chercheurs ont analysé la taille de l’écho qui rebondit sur les différentes parties du papillon.
La position des ailes joue un grand rôle dans la façon dont les sons rebondissent sur le papillon en plein vol : davantage de bruit sera réfléchi lorsque les ailes sont perpendiculaires que quand elles sont parallèles, offrant une plus grande cible à la chauve-souris. Comme il y a tellement de variations dans les échos réfléchis, les chercheurs ont émis l’hypothèse que les chauves-souris pourraient simplement cibler le centre du nuage de bruit quand elles chassent.
Selon le principal auteur de l’étude, Wu-Jung Lee :
Citation :
Un papillon de nuit est un objet très compliqué dans l’espace. Il pourrait être difficile pour une chauve-souris de suivre chaque point du nuage d’écho individuellement. Il serait beaucoup plus facile pour elle de se dire: “Il y a une boule d’échos qui revient, je vais frapper le centre de celui-ci, et peut-être que je vais attraper quelque chose."
C’est une excellente stratégie pour les papillons lune qui ont perdu leur queue, puisque Lee et ses collègues ont constaté que, dans de tels cas, le centre du nuage d’écho est la cible menant au papillon. Mais la queue ajoute ses propres réflexions au mélange, dans toutes les directions en raison de sa forme, ce qui déplace légèrement le centre du nuage pour mieux tromper la chauve-souris. Certes, leur modèle pour le ciblage de la chauve-souris est une approximation. Les scientifiques ne savent pas vraiment quel type de traitement du signal les chauves-souris utilisent. Mais c’est un indice intéressant.Les chercheurs espèrent maintenant en apprendre davantage dans de futures expériences qui leur permettront de savoir comment la queue influence le vol d’un papillon de lune.
L’étude publiée dans The Journal of the Acoustical Society of America : Can the elongated hindwing tails of fluttering moths serve as false sonar targets to divert bat attacks? et présentée sur le site de l’université John Hopkins : Luna moth’s twisted tail could confuse bat’s sonar, researchers say.
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La queue de ce papillon de nuit trompe le radar des chauves-souris !