Il y a 25 ans, les instruments de l’Humanité assistaient pour la première fois à un impact planétaire, en l’occurrence celui des 21 fragments de la comète Shoemaker-Levy 9 sur Jupiter. L’évènement a été déterminant dans la prise de conscience politique de la nécessité de protéger la Terre des impacts en détectant suffisamment à temps les géocroiseurs potentiellement dangereux.
Officiellement désignée par D/1993 F2 et parfois abrégée en SL9, cette comète avait été repérée dans la nuit du 24 mars 1993 sur une photographie prise avec le télescope de Schmidt de l’Observatoire du Mont Palomar (Californie) par les astronomes américains Carolyn et Eugene Shoemaker, le Québécois David Levy et l’astronome français Philippe Bendjoya alors jeune étudiant (il est aujourd’hui professeur au Laboratoire J.-L. Lagrange à l’université Nice Sophia-Antipolis). La découverte de SL9 a tout de suite été remarquable pour deux raisons. Les calculs issus de la mécanique céleste, que l’on doit à des grands noms des mathématiques tels Lagrange et Laplace, ont montré que la comète venait tout juste de se fragmenter lors d’un passage en juillet 1992 sous la limite de Roche de Jupiter. Ses forces de marée ont produit 21 débris dont certains ont jusqu’à deux kilomètres de diamètre. Or tout indiquait qu’ils allaient très bientôt entrer en collision frontale avec la géante gazeuse, ce qu’ils allaient effectivement faire du 16 au 22 juillet 1994 à une vitesse d’environ 60 kilomètres par seconde. La première collision planétaire en direct L’évènement allait être sans précédent et d’une grande importance. Le programme Apollo avait permis d’établir sans conteste possible la nature des cratères lunaires. Tous des cratères d’impacts, ou peu s’en fallait, et rarement des cratères ou des caldeiras d’origine volcanique. On avait donc pris la mesure de l’importance des impacts dans l’histoire du Système solaire et l’on savait désormais comment interpréter aussi ceux sur d’autres planètes comme Mars ou Mercure. En fait, cette interprétation des cratères lunaires avait déjà reçu un soutien dès les années 1960 par les travaux d’Eugene Shoemaker dont la formation initiale était celle d’un géologue. Il avait montré notamment que le fameux Meteor crater en Arizona ne pouvait être d’origine volcanique et était bien un cratère d’impact. Shoemaker participa donc à l’entraînement des astronautes américains et il aurait dû être le premier géologue à marcher sur la Lune mais il échoua médicalement aux tests (décédé en juillet 1997, une partie de ses cendres fut tout de même apportée sur le sol lunaire par la sonde spatiale Lunar Prospector le 31 juillet 1999). Par la suite, en arrivant au Caltech en 1969, il entama une recherche systématique des géocroiseurs avec sa femme Carolyn qui les conduisit à découvrir des dizaines de comètes et des centaines d’astéroïdes. Au début des années 1990 donc, l’importance des impacts pour la planétologie et la cosmogonie du Système solaire ne fait plus de doute et ce d’autant plus que l’on vient de découvrir le cratère de Chicxulub. La collision de Shoemaker-Levy 9 avec Jupiter est perçue comme la première occasion d’étudier concrètement un tel phénomène cosmique et pas de le simuler en laboratoire ou de l’analyser théoriquement au moyen d’équations. Une collision suivie avec Hubble et Galileo Des yeux de l’Humanité ont tout de suite été mobilisés pour observer et étudier la collision, en particulier l’Infrared Telescope Facility (IRTF) de la Nasa (installé au sommet de Mauna Kea à Hawaï qui était destiné à accompagner les missions Voyager) mais aussi le télescope Hubble et les instruments de la mission Galileo déjà en route vers Jupiter et qui allaient se retrouver dans une position privilégiée pour assister vraiment au début des impacts, à 238 millions de kilomètres de distance. La comète SL9, ou plus exactement ses fragments, allaient en effet entrer en contact avec l’atmosphère de Jupiter sur sa face cachée. Par contre, du fait de la rapidité de sa rotation sur elle-même, environ 10 heures, les effets de l’impact allaient rapidement être visibles avec les télescopes sur Terre. Ils ont stupéfié la communauté des astronomes, planétologues et spécialistes de l’atmosphère de Jupiter. L’étude de l’impact de Shoemaker-Levy 9 a aidé les scientifiques à renforcer leurs modèles de ce qui pourrait arriver si une comète ou un astéroïde venait à frapper la Terre. Surtout, l’évènement était tellement spectaculaire que le congrès américain a fini par prendre au sérieux la menace des impacts cométaires et astéroïdales pour la Planète bleue. En 1998, influencé par Eugene Shoemaker et d’autres scientifiques, il décida donc de lancer un programme pour le recensement des petits corps célestes susceptibles de croiser l’orbite de la Terre et pouvant représenter un danger potentiel.
Source : [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] & Futura Sciences
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Une comète plongeait dans Jupiter il y a 25 ans (vidéo) By Jack35