Un livre du XIXe siècle relié avec de la peau humaine dans la bibliothèque d'Harvard !Des scientifiques de l'université d'Harvard viennent de confirmer une rumeur pour le moins morbide : l'un des ouvrages de la bibliothèque d'Houghton est bien relié avec la peau d'une femme, décédée au XIXe siècle d'une crise cardiaque. Le procédé porte le nom de bibliopégie anthropodermique, une pratique relativement courante entre le XVIe et le XIXe siècle.[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] par [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]Tous les manuscrits de
la bibliothèque d’Houghton, à
Harvard, sont rares et précieux. Mais l’un d’entre eux fait particulièrement parler de lui depuis quelques semaines :
"Des destinées de l’âme", de l’auteur français
Arsène Houssaye (1814-1896).
Il est l’un des trois volumes suspectés d’avoir été relié avec … de la peau humaine. Et la rumeur vient d’être confirmée par des scientifiques de la prestigieuse université américaine.
Alan Puglia,
conservateur des livres anciens à Harvard, est aujourd’hui sûr à 99% que l’ouvrage, propriété de l’université depuis 1954, est un exemple de ce que l’on appelle la ‘bibliopégie anthropodermique’.Un essai sur l'âme enveloppé d'un "vêtement humain"“Ce livre est relié en peau humaine parcheminée, c’est pour lui laisser tout son cachet qu’à dessein on n’y a point appliqué d’ornement”, explique une note laissée dans le manuscrit par le
Docteur Ludovic Bouland. Ami d’
Arsène Houssaye et éminent bibliophile, c’est lui qui aurait eu l’idée de donner aux Destinées de l’âme une couverture en peau humaine. Traitant de l’esprit et de la vie après la mort, le livre
“méritait bien qu’on lui donnât un vêtement humain”, poursuit le médecin
Mais il aura fallu des analyses scientifiques pour prouver les dires du
Dr. Bouland. De minuscules échantillons de la couverture ont donc été prélevés pour être soumis à des tests, visant à identifier les protéines pour en obtenir l’empreinte peptidique (‘peptide mass fingerprint’ en anglais, ou PMF).
Les protéines analysées pour éliminer les autres sources de parchemin “La PMF des Destinées de l’âme correspond à la référence humaine, et a clairement éliminé les autres sources communes des parchemins, comme le mouton, le bétail et la chèvre”, affirment dans un communiqué les scientifiques responsables des analyses.
“Cependant, même si la PMF est conforme avec l’humain, d’autres primates très proches de l’homme, comme les grands singes et les gibbons, ne peuvent pas être éliminés en raison du manque de références nécessaires”, poursuivent les spécialistes.
Des analyses plus poussées, à l’aide d’un procédé appelé chromatographie en phase liquide couplée à la spectrométrie de masse, ont permis aux scientifiques d’affirmer qu’il est très peu probable que de la peau de primate ait été utilisée lors de la reliure de ce livre. Les deux autres ouvrages étudiés ont en revanche été reliés à l’aide d’un matériau plus traditionnel, de la peau de mouton.
Si l’on s’en tient aux informations contenues dans la note de
Ludovic Bouland, la peau utilisée pour relier Des destinées de l’âme aurait été prélevée sur le dos d’une patiente d’un hôpital psychiatrique, décédée des suites d’une crise cardiaque.
“En la regardant attentivement, on distingue facilement les pores de la peau”, précise
Ludovic Bouland, soucieux du détail.
Une pratique ancienne et symbolique L’anecdote peut sembler morbide, mais la pratique de la bibliopégie anthropodermique a été durant plusieurs siècles relativement commune et même prestigieuse. On en retrouve les premières traces au XVIIème siècle.
En 1605, le roi d’Angleterre Jacques Ier aurait ainsi ordonné que la peau d’un traître, Henry Garnet, soit utilisée pour orner les exemplaires d’un recueil contant sa trahison, rapporte le site "Actualitté".Faire relier un ouvrage avec sa propre peau aurait également été un moyen de se rappeler au bon souvenir de ses proches après la mort, explique dans un post de blog
Heather Cole, assistante curatrice pour les manuscrits et livres modernes de
la bibliothèque d’Houghton. Une sorte de legs en nature, connu sous le nom d’
auto-bibliopégie anthropodermique.La pratique aurait été utilisée jusqu’au XIXe siècle.
"Actualitté" cite ainsi l’exemple de
James Allen, un bandit de grand chemin qui a tenu à ce que l’histoire de ses crimes soit reliée avec sa peau et offerte à son principal adversaire,
John Fenno, comme
“preuve de [s]on estime”.Mais la plupart du temps, les criminels n’avaient pas leur mot à dire, et leur peau était utilisée après leur exécution pour relier les ouvrages relatant la plupart du temps leurs méfaits. Certains ont eu un peu plus de 'chance', comme
George Cudmore, qui après avoir été exécuté pour le meurtre de sa femme, a finalement servi de reliure à un recueil de poèmes de
John Milton.Source : [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]