Les huîtres fortement affectées par l'acidification des océansDepuis quelques années, les récoltes d’huîtres dans le Pacifique nord sont décevantes. De moins en moins de larves arrivent à l’âge adulte. Ceci s’explique par la forte acidification de l’océan qui perturbe les premières 48 h de leur développement, essentielles à la bonne croissance de l’huître.[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]La France est le premier producteur européen d'huîtres. Elle en produit 130.000 t par an, ce qui représente 90 % du marché européen. Notre pays cultive 98 % d'huîtres creuses (Crassostrea gigas) et 2 % d'huîtres plates.L’
océan absorbe 45 % des
émissions anthropiques de CO2. Une partie du gaz carbonique pénètre dans les profondeurs sous l’action de la circulation thermohaline. En surface, l’océan échange avec
l’atmosphère. Le
CO2 atmosphérique est alors absorbé et transformé sous forme de trois
acides :
le bicarbonate (HCO3-), le carbonate (CO32-) et le gaz carbonique dissous. Plus l’océan absorbe du gaz carbonique, plus il s’acidifie, si bien que depuis le début de l’ère industrielle, l’acidité moyenne a grimpé de 30 %.
L’
acidification des océans n’est toutefois pas homogène. Il va de soi qu’une région côtière, où le trafic maritime est dense, risque d’être plus acide qu’une zone au beau milieu de l’océan large. C’est pourquoi il est difficile d’évaluer la réponse des
espèces animales au changement de milieu. Nombre d’études sont menées, mais bien souvent seulement en laboratoire. L’année dernière, une étude montrait tout de même que dans l’
océan austral, les carapaces de certains animaux se délitaient. Une nouvelle recherche prouve maintenant que les
huîtres sont aussi affectées.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]L'huître du Pacifique (Crassostrea gigas),
appelée également huître creuse, est originaire du nord-ouest du Pacifique. Aujourd'hui introduite dans un grand nombre de régions du monde, elle est pour nous la plus commune des huîtres, que l’on trouve par exemple à l'île d'Oléron. Ces dernières années, les récoltes d’huîtres du nord-ouest du Pacifique ont été franchement décevantes. En moyenne, moins de
larves ont réussi à atteindre l’âge adulte. Pour comprendre pourquoi, une équipe de l’
Oregon State University a étudié en détail les premiers stades de développement des larves des
huîtres du Pacifique (Crassostrea gigas). Dans ses premières 48 h de vie, la larve développe sa
coquille dix fois plus vite que lorsqu’elle a cinq jours. En deux jours, la
coquille formée fait déjà 90 % du poids de la larve.
Les ions de carbonate de calcium réagissent avec l’eau acideUne
larve d’huître construit sa coquille en précipitant le carbonate de
calcium. Cette croissance est possible en raison du stock d’éléments nutritifs dont elle dispose dans l’œuf. Les larves sont donc particulièrement sensibles à
l’acidité de l’eau dès les deux premiers jours de leur croissance, car c’est à ce moment-là qu’elles fabriquent leur coquille protectrice. Dans l’étude, publiée dans les
Geophysical Research Letters, l’équipe du biologiste George Waldbusser montre que lorsque le pH de l’eau diminue, les ions de carbonate de calcium réagissent plutôt avec les ions carbonatés de l’eau plus acide, réduisant alors la disponibilité en ions pour la formation de la coquille.
La physiologie de ces organismes est donc liée à la cinétique des minéraux qu’ils contiennent. L’étude pourrait être très utile pour aider les
ostréiculteurs à s’adapter à l’acidification des océans. Sachant que les huîtres sont extrêmement sensibles aux conditions
alcalines de leur milieu, essentiellement durant les deux premiers jours suivant leur naissance, ils pourraient utiliser des solutions pour tamponner (au sens chimique) le milieu durant cet épisode crucial.
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