Chaque année, l’Europe produit à elle seule 25,8 millions de tonnes de déchets plastiques. 60 % d’entre eux proviennent uniquement de nos emballages. Si leur durée d’utilisation est restreinte, souvent quelques minutes, leur vie avant dégradation peut s’étendre quant à elle à des centaines d’années. Les océans en débordent. À contre-courant de cette tendance du tout plastifié, des épiceries ont misé sur le 100% sans emballage. À Toulouse, en plein centre-ville, Ceci & Cela propose des produits locaux et bio, le tout en vrac. Une solution de plus pour réduire notre impact sur l’environnement.
À son ouverture en 2016, Ceci & Cela faisait partie des toutes premières épiceries de France à proposer des aliments à acheter sans emballage. Mais le succès du vrac a gagné toute la France, où l’on compte désormais 160 boutiques de ce genre. Signe de ce succès, Louise et son équipe, à l’origine de Ceci & Cela, ont quant à eux ouvert un second point de vente pour répondre à la demande. “Au départ je suis partie de plusieurs constats”, se souvient Louise : “le problème du suremballage et celui du plastique ». Mais ce n’est pas tout. Dans le même temps, elle se souciait de la « provenance et de la traçabilité » des produits proposés à la vente. Finalement, le but du projet est « d’avoir une certaine cohérence écologique, pour nous et les clients”. Dans ce magasin 90 %, les produits – céréales, riz, pâtes, huile d’olives, fruits et légumes, épicerie sucrée et salée, lessive – sont biologiques et la grande majorité d’entre eux est issue d’une production locale. L’approche va donc souvent plus loin qu’une question d’emballage. L’épicerie fonctionne en circuit court et travaille en direct avec 80 producteurs. Cependant, le local reste préféré au bio : “On choisit de favoriser le local au bio. Quand il n’y a pas autour de Toulouse, on élargit au fur et à mesure. En revanche, le thé le café et le sucre, on ne les trouve pas en France” précise Louise. À chacun de nous de décider, si l’on souhaite ou non consommer ces produits dont on oublie vite qu’ils sont exotiques. Cédric est un client régulier, pour lui, le vrac, “c’est avant tout une démarche citoyenne. Même si certains produits sont plus chers, je préfère acheter du riz produit à proximité que du riz bio qui a fait des milliers de kilomètres pour arriver ici. Ça me permet de réduire mon empreinte écologique. Et en prenant en vrac, j’achète uniquement ce dont je vais avoir besoin. Comme ça, je ne gaspille pas”, nous confie-t-il.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image] Crédit image : Marine Gamot / Mr Mondialisation [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image] Crédit image : Marine Gamot / Mr Mondialisation
L’épicerie anti-gâchis Et pour cause, le gaspillage reste une problématique majeure : chaque année en France, chaque personne gaspille entre 20 et 30 kg d’aliments au niveau domestique. Une trop grande partie de nos achats finit dans les poubelles, sans même avoir été déballée. Si l’on regarde à l’échelle planétaire, de la production à la consommation, 30 % de la nourriture produite ne sera jamais mangée. Aujourd’hui, l’ensemble du gaspillage alimentaire représente à lui seul, 3,3 milliards de tonnes de CO2. Face à ce constat, Louise et ses collègues ont décidé d’inscrire l’épicerie dans une démarche anti-gâchis : “pour éviter les pertes, on met en promo ce qui est abimé ou ce qui va bientôt être périmé. Quand c’est nécessaire, on utilise Too Good to Go.” Via cette application, les clients peuvent acheter les invendus à faible prix, encourageant ainsi la réduction du gaspillage. L’enseigne va encore plus loin dans la démarche, puisqu’elle fait appel à Easy Tri une société qui récupère les biodéchets : “Ce qui n’est pas vendable, on en fait du compost.” Chaque aspect de la vie d’un produit est « pensé » dans une démarche holistique.
Le Zéro déchet, c’est possible ! Dans l’optique de se passer complètement des emballages et de lutter radicalement contre le gaspillage et la pollution, l’épicerie encourage naturellement le zéro déchet. Cédric a pu le constater à son échelle : “acheter des produits en vrac ça m’a permis de réduire mes déchets quotidiens et surtout ceux en plastiques. Je réutilise le même sachet et ensuite je mets dans des bocaux. En fait, la démarche est simple. Il suffit de modifier certaines habitudes.” Les chiffres justifient cette démarche : 85% des emballages jetés par les foyers proviennent de l’alimentaire. Alors qu’en France 365 kilos de déchets transitent en moyenne par les poubelles de chacun, une évolution des pratiques s’impose.
Ceci & Cela essaye d’ailleurs d’influencer à son échelle. C’est ainsi que l’équipe a remis au goût du jour une vieille pratique, la consigne : “On incite les clients à venir avec leur propres récipients. Quand c’est possible , on fait en sorte que les producteurs récupèrent leurs contenants. Hormis le vin et certaines bières, tous les contenants en verre sont consignés. Et là, on est à zéro déchet ! C’est mieux que le recyclage, car ça a moins d’impact sur l’environnement. La consigne est gratuite pour le client, quand on ne nous la facture pas. Sinon elle va de 20 centimes à 1,50€. À lui de jouer le jeu et de la ramener pour récupérer son argent”, précise Louise. Les producteurs doivent quant à eux être dans la même démarche. Récupérer et nettoyer le verre consigné, c’est du travail ajouté. Mais ce sont aussi des économies de faites, puisque les mêmes récipients sont sans cesse réutilisés. Le plastique, quant à lui, a été supprimé autant que faire se peut “On le retrouve dans certains gros contenants ou par exemple dans l’emballage des palettes. L’entreprise Green Bureau le récupère pour le recycler”, confie Louise. Mais ceci ne se fait pas sans conséquence. Cette démarche a un coûté financier important et demande beaucoup d’engagement. Ces efforts sont cependant récompensés : le commerce ne remplit plus qu’une seule poubelle par semaine !
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“Des solutions existent à tous les niveaux” Répondant à une demande croissante, Ceci & Cela organise enfin des évènements santé/bien-être. Pour la gérante , “l’objectif est de mettre en avant les solutions. On sait qu’il y a une crise environnementale et des problèmes. Mais des solutions existent à tous les niveaux. Notre démarche, c’est d’être dans le positif et de créer un véritable espace de vie convivial pour donner envie aux gens de continuer dans ce sens. L’idée c’est que ce soit fun”. Pendant ces moments conviviaux – une dizaine chaque mois – on apprend à faire ses propres produits ménagers ou cosmétiques, à fabriquer un sac, à utiliser ses épluchures. Ainsi, pendant que les industriels traînent des pieds, à l’image de Ceci & Cela, de petit commerces indépendants, soutenus par des citoyens et des citoyennes engagés, montrent qu’il est possible de réduire drastiquement ses déchets. Reste à faire comprendre aux citoyens que c’est désormais une question de survie pour bien des espèces et notre environnement. Pour les curieux, rendez-vous sur ConSovrac, un site qui répertorie les épiceries sans emballage dans le monde entier.