Tara Océans 2013 : l'expédition se prépare au départ vers l'Arctique
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Le Tara est une goélette : le mât avant est plus petit ou,
comme c'est le cas ici, aussi haut que le mât principal. Elle dispose
d’une coque d'aluminium et d’une double quille relevable, conçue pour
résister à la glace. À bord de ce navire de 36 mètres de long pour 10 de
large, la place est prévue pour la quinzaine de personnes, équipage et
scientifiques, qui œuvrent à bord.Jour J-2 avant le départ de l’expédition Tara Oceans Polar Circle 2013, qui s’en va faire le tour de l’Arctique.
Contacté par Futura-Sciences, Romain Troublé, le secrétaire général de
Tara Expéditions, s’est confié sur les préparatifs en cours, mais aussi
sur le déroulement et les objectifs scientifiques de ce périple de
25.000 km à bord de la goélette Tara.Les préparatifs vont bon train aux abords d’un quai de Lorient, là où la goélette
Tara s’apprête pour sa prochaine expédition scientifique :
Tara Oceans Polar Circle 2013. « C’est un peu le bazar, mais tout va trouver sa place au dernier moment »,
selon
Romain Troublé, le secrétaire général de
Tara Expéditions que
Futura-Sciences a contacté. Le nombre de choses à stocker lorsque l’on
prend la mer pour sept mois est effectivement conséquent.
« Il y a de la nourriture partout, sous les bannettes, dans les fonds, etc. », même si des aliments frais seront achetés durant les
escales.
La
goélette larguera les amarres le dimanche 19 mai à 15 h 00, emmenant 14 membres
d’équipage. Elle prendra la direction des
îles Féroé, pour entamer son
périple de 25.000 km autour du pôle Nord dans le sens inverse des
aiguilles d’une montre, donc en empruntant d’abord le mythique
« passage du nord-est » au large de la
Sibérie. «
Nous connaissons approximativement la route que nous allons suivre,
mais la navigation et le choix précis des sites de prélèvement
dépendront d’un savant mélange entre les conditions météorologiques, les
conditions de mer et les données satellite (caractéristiques des masses d’eau, couleur des océans, courants, etc.). »Tara Oceans Polar Circle est avant tout une aventure scientifique qui va parachever l’ambition de
Tara Océans.
Durant une précédente campagne d’un peu moins de trois ans (de
septembre 2009 à mars 2012), 126 scientifiques s’étaient relayés à bord
de la goélette pour récolter et analyser des
échantillons d’eau et les organismes planctoniques qu’ils contenaient, dans tous les océans du globe, sauf… en
Arctique. [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Itinéraire que suivra Tara Oceans Polar Circle 2013 entre mai et décembre 2013. Les étoiles grises indiquent les positions prévues des stations de prélèvement.La biodiversité planctonique de l’Arctique à la loupeConcrètement, la goélette devrait s’arrêter en mer
deux à trois fois par mois, pour une durée de deux jours, afin de
réaliser toute une série de prélèvements. Ces derniers seront effectués à
trois profondeurs différentes : en surface, entre 0 et 200 m (là où il y
a le plus de
phytoplancton, à cause de la présence de
lumière et de
nutriments),
entre 500 et 1.000 m (notamment pour quantifier la matière organique
qui précipite). De plus, durant les déplacements du navire, des mesures
physico-chimiques seront réalisées en continu par une quinzaine
d’appareils dédiés : température,
salinité de l’eau, turbidité, pigments de l’eau, p
ression partielle en CO2 dissous, etc.
« Des photographies d’organismes vivants seront faites à bord, mais comme pour toutes les missions océanographiques, la plupart des analyses se feront en laboratoire ». Elles devraient permettre de mieux connaître les
organismes planctoniques peuplant l’Arctique, du virus à la
larve de poisson,
tout en caractérisant les interactions qui les unissent et leur
dépendance aux propriétés physico-chimiques de leur environnement.
Le
projet
Tara Oceans Polar Circle va tout simplement
« s’intéresser à un écosystème entier », ce qui est assez rare à une telle échelle. Il apportera sa contribution à la recherche polaire active en
Arctique.
L’
étude du plancton n’est pas anodine, tant les informations qu’il fournit sont nombreuses,
notamment dans cette région sensible au réchauffement climatique. Le
phytoplancton participe activement au fonctionnement du plus grand
puits de carbone de la planète, en capturant de grandes
quantités de CO2, tout en produisant 50 % de l’oxygène consommé sur Terre. Or,
« on n’a aucune idée précise de la quantité de carbone
qu’absorbent les océans, et à quel rythme. Il existe bien des
projections, mais elles sont imprécises. Cependant, les premiers
résultats de Tara Oceans nous permettent déjà d’avoir une première
vision de ce fonctionnement.»[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
La rosette de Tara Océans a été mise au point au laboratoire de Villefranche-sur-Mer, par Marc Picheral. Elle porte dix bouteilles de prélèvement et, dispose d’un l'UVP (Underwater Vision Profiler)
visible au premier plan. Cette caméra, dirigée vers le bas, filme tout
au long d’une descente la tranche d'eau éclairée par deux projecteurs horizontaux. Un ordinateur capte les images et compte les organismes (entre 500 microns
et quelques centimètres), en temps réel. Des structures fragiles sont
ainsi repérées et identifiées, alors qu'elles seraient écrasées dans un
filet à plancton.Voir jusqu’où s’immiscent les pollutions anthropiquesLes 21 laboratoires impliqués dans le projet
Tara Océans poursuivent également l’aventure.
« Les échantillons que nous prélèverons seront analysés avec le même matériel, selon le même protocole et avec le même calibrage.
Nous pourrons ainsi faire des comparaisons. Cependant, nous nous sommes
aussi associés avec des centres de recherche canadien et russe pour
profiter de leur expérience de l’Arctique. »De nouveaux paramètres seront aussi étudiés durant cette navigation circumpolaire.
« Un capteur pouvant mesurer la concentration en mercure atmosphérique a été installé sur le mât. Des mesures seront également réalisées dans l’eau, pour déterminer les quantités dissoutes. […] Nous tirerons aussi un filet adapté à la récolte de particules de plastique 15 à 20 minutes par jour. » Ainsi,
l’expédition permettra de déterminer quelles pollutions anthropiques
peuvent s’immiscer dans des régions particulièrement reculées de la
planète.
Un rôle de sensibilisation du public à ne pas oublierLa
goélette Tara, achetée en 2003 par la styliste Agnès b. et Étienne Bourgois, le
directeur général de la marque de vêtement éponyme, a reçu quelques
systèmes supplémentaires en vue de son futur voyage.
« Une plaque chauffante a été installée sur le pont pour éviter que la rosette CTD ne gèle »,
puisque la température devrait osciller entre -10 °C et 5 °C. Le laboratoire de pont, où ont lieu les filtrations scientifiques, et la soute avant, ont également été équipées d’un système de chauffage, car « certains échantillons, ainsi que les fruits et légumes ne doivent pas geler ».
Enfin, un système de caméras est actuellement
installé sur le voilier. Cinq minutes du quotidien de l’expédition
seront ainsi filmées, puis présentées sur
Internet sous forme de petites séquences vidéo. En effet, cette aventure humaine
vise également à interpeller et à sensibiliser le public à la crise
écologique des océans.
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