Le changement climatique laisse son empreinte dans la stratosphère
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]L'oscillation quasi biennale (OQB) désigne la variation de direction des
vents stratosphériques au niveau de l'équateur. Sur une période de près
de 28 mois, les vents d'ouest deviennent des vents d'est. Le diagramme
ci-dessus montre l'OQB. Les valeurs positives de la vitesse du vent
(exprimée en m/s) montrent un vent d'ouest, tandis que les valeurs
négatives montrent les vents d'est. L'échelle de pression à gauche
indique l'altitude (des pressions de 70 hPa et de 10 hPa s'observent
respectivement à 19 km et un peu plus de 30 km d'altitude).Dans la stratosphère,
les vents dominants au niveau de l’équateur changent de direction
régulièrement. Cette oscillation est parfaitement naturelle, mais il
apparaît qu’elle s’est affaiblie ces 60 dernières années. La diminution
de son amplitude est une conséquence directe du changement climatique.Et s’il fallait regarder ce qui se passe dans la stratosphère pour mettre en évidence le
changement climatique ? Dans cette couche atmosphérique, au niveau de l’équateur, les vents
dominants alternent entre puissants vents d’ouest et puissants vents
d’est. Ce comportement oscillatoire, décrit sous le nom d’
oscillation quasi biennale (OQB), a une période moyenne de 28 mois. La variation de direction de
l’OQB est mystérieuse, mais elle impacte la composition chimique de
toute
l’atmosphère. En effet, la stratosphère abrite la couche d’ozone, dont la distribution dépend de la circulation atmosphérique.
Si
l’OQB n’est pas une oscillation qui dépend des
paramètres astronomiques, elle est influencée par le changement
climatique. Une étude menée conjointement par l’
International Pacific Research Center (IPRC, Hawaï) et
la Japan Agency for Marine-Earth Science and Technology
(Jamstec, Japon) suggère que l’amplitude de l’oscillation a diminué au
cours des six dernières décennies. L’analyse, dont les résultats sont
publiés dans la revue
Nature, est basée sur des observations de
radiosondage
près de l'équateur pour la période 1953-2012. Elle démontre une
tendance à l’affaiblissement de l’
OQB sur le long terme. Là où la
pression est de 70 hPa, c'est-à-dire à environ 19 km d’altitude,
l’amplitude de l’oscillation quasi biennale a diminué d’environ un tiers
au cours de la période.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Comparaison entre l'amplitude de l'OQB mesurée par le
radiosondage (graphique a) et celle calculée par l'un des modèles
utilisés (graphique b). L'amplitude est exprimée en m/s. Le graphique c
montre la vitesse verticale d'ascension de l'air calculée par le modèle. Elle est exprimée en mm/s.La circulation à l’équateur se caractérise par les
cellules de
Hadley. Les particules de l’air s’élèvent verticalement
depuis la surface jusqu’en haute atmosphère, où elles peuvent facilement
atteindre 16 km d’altitude. Elles sont ensuite redirigées vers les
hautes
latitudes. La montée de l’air vers la
stratosphère est lente, certaines particules peuvent mettre plusieurs décennies à l’atteindre.
Cet
upwelling de l’air entre la basse et la haute atmosphère impacte fortement la
chimie de l’atmosphère
dans son ensemble, car les compositions chimiques des deux couches sont
très différentes. Dans leur étude, les chercheurs
Yoshio Kawatani et
Kevin Hamilton suggèrent que l’oscillation quasi biennale a perdu en
amplitude à cause du renforcement de cet upwelling.
L'OQB, marqueur du changement climatiqueCe résultat est basé sur la comparaison des données issues des radiosondages et des simulations de modèles atmosphériques.
« Nous constatons une tendance similaire dans les modèles numériques de l'atmosphère quand ils simulent le siècle dernier en tenant compte des changements dans les émissions de gaz à effet de serre », précise
Kevin Hamilton. Les chercheurs démontrent que le renforcement du
mouvement ascendant de l’air supprime la force des vents de l’OQB dans les
modèles. Ils en ont alors déduit que la tendance observée dans les
radiosondages est une confirmation du renforcement de la montée de l’air
vers la stratosphère à l’équateur.
Un tel changement de comportement en haute atmosphère peut être vu comme l’empreinte du réchauffement global du
climat. Les résultats des modèles sont en accord avec les observations et simulent l’évolution de la
circulation atmosphérique
dans la stratosphère en prenant en compte l’influence de l’augmentation
des concentrations en gaz de serre, mais aussi en polluants.
L’affaiblissement de l’OQB peut donc servir de marqueur du changement
climatique.
Le flux d’air ascendant de la basse atmosphère vers
la haute atmosphère joue un grand rôle dans la circulation atmosphérique
générale.
Kevin Hamilton en donne l’un des principaux atouts.
« L’utilisation de produits chimiques destructeurs de la couche d’ozone, comme les fréons utilisés pour les bombes aérosols et les réfrigérateurs,
a été interdite voilà 20 ans. Ces produits peuvent néanmoins rester
plusieurs décennies dans l’atmosphère. Ils sont lentement transportés de
la basse atmosphère vers la haute atmosphère, où ils sont détruits.
Plus l’ascendance se renforce, plus les aérosols sont détruits rapidement. L’atmosphère retrouvera donc plus vite une couche d’ozone à la concentration naturelle. »Source : [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]