Frelon asiatique : "pourquoi les municipalités ne distribuent-elles pas des pièges ?"[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Les nids de frelons asiatiques sont souvent perchés dans les arbres.La semaine dernière, une femme est décédée des suites d'une piqûre
de frelon asiatique après avoir passée plusieurs jours dans le coma.
Alors que l'insecte gagne chaque année un peu plus de terrain, Maxisciences a
décidé de faire le point sur la question en interrogeant Philippe
Priquet, gérant de la filiale AVIPUR Gironde spécialisée dans la lutte
contre ces insectes. Maxisciences : Quel est le rôle de votre société dans la lutte contre cet insecte ?Philippe
Priquet : La filiale AVIPUR Gironde a été fondée en novembre 2004 et a
plusieurs activités parmi lesquelles le traitement anti-parasitaire,
essentiellement des insectes. A l'époque, cela constituait environ 30 à
40% de nos interventions. Puis en 2005 et 2006, les premiers frelons
asiatiques ont commencé à apparaitre dans la région et personne ne
savait les traiter. C'est là que nous avons réalisé nos premières
interventions sur des nids. La première année entre avril et septembre,
nous avons environ eu 10% de nids de frelons asiatiques sur une centaine
d'interventions tout insecte confondu. Au fil des années, ça a ensuite
augmenté peu à peu. Nous sommes passés à 50% de nids de frelons
asiatiques pour 50% de nids de guêpes et de frelons européens.
Et aujourd'hui, où en êtes-vous ?Ces dernières années,
le frelon
asiatique a gagné du terrain et a atteint de plus en plus de
départements. Aujourd'hui, il y en a même jusqu'en Espagne et au nord du
Portugal ! C'est pareil en Gironde où il y en a de plus en plus. Nos
interventions ont donc beaucoup augmenté : depuis 3 années, sur les 200 à
300 décrochages que nous menons par an, 90% concernent des frelons
asiatiques et seulement 10% d'autres insectes. Mais on observe aussi une
évolution dans la localisation des nids. Les trois premières années, on
les trouvait en haut des arbres à près de 20 mètres de hauteur. Puis
petit à petit, ils sont apparus sur les toits de maison dans les
campagnes comme dans les villes. Aujourd'hui, il peut y en avoir partout
même sous des plaques d’égout.
Quel danger le frelon asiatique représente t-il pour l'homme ?En vérité, le frelon asiatique n'est pas plus dangereux qu'une guêpe. Sa
piqûre
est même moins douloureuse que celle d'une abeille qui va laisser son
dard et une partie de son abdomen. Le frelon lui pique juste puis se
retire. Les victimes recensées chaque année sont décédées suite à des
réactions allergiques. Le seul problème, c'est que si l'on a jamais été
piqué, on ne sait pas si on est allergique ou non. Et même si c'est le
cas, il est parfois difficile d'éviter la piqûre.
Que doit-on faire alors si l'on repère un nid ?Il
est en fait très difficile de voir un nid. Ils peuvent être partout et
leur taille peut aussi bien égaler celle d'une balle de golf que celle
de deux à trois ballons de basket ! Ce qui arrive plutôt, c'est par
exemple le jardinier qui s'active tranquillement dans son jardin et qui
voit soudain plein d'insectes sortir d'un même endroit. A ce moment-là,
il faut faire preuve d'une extrême prudence car le frelon asiatique peut
attaquer en nombre. L'idéal est d'établir un périmètre de sécurité et
de se protéger en portant des vêtements qui couvrent bien les zones du
corps. Ensuite, il faut prévenir le service technique de sa municipalité
qui est parfois habilité à intervenir ou alors une société spécialisée.
Dans plusieurs départements, les pompiers ne sont plus autorisés à
faire ce genre d'interventions.
Existe-t-il des moyens pour prévenir l'apparition de nids ?Oui
et justement, l'absence de prévention est selon moi un vrai problème.
Certains municipalités touchées par le frelon asiatique ont mis en place
des dispositifs d'informations pour les habitants. Mais très peu est
fait du point de vue de la prévention. A mon avis, il y a une démarche à
avoir qui n'y est pas. Pourquoi ces municipalités ne distribuent-elles
pas des pièges à leurs habitants ? Un petit piège, ça ne coûte pas cher
et c'est facile à poser. Il suffirait d'en mettre à plusieurs endroits à
la fin de l'hiver et au début du printemps pour capturer 50 à 80% des
frelons asiatiques et surtout des reines fondatrices. La seule
difficulté, c'est que ces pièges attrapent aussi d'autres insectes.
Comme les frelons asiatiques sont plus gros, il faut en fait mettre au
point un système adapté qui laisse repartir les insectes plus petits.
Si le frelon n'est pas si dangereux que cela pour l'homme, pourquoi inquiète t-il autant ? Le
frelon n'est peut-être pas plus dangereux qu'une guêpe pour l'homme
mais pour la biodiversité, c'est un énorme fléau, surtout pour les
abeilles. Au cours de mes interventions, j'ai rencontré plusieurs
apiculteurs qui m'ont dit que leur cheptel avait été totalement décimé
par les frelons qui n'hésitent pas à s'attaquer à des ruches entières.
Les abeilles connaissent un vrai déclin aujourd'hui et le frelon est une
menace de plus pour leur espérance de vie. Et si on touche les
abeilles, on touche aussi la pollinisation des végétaux.
Mais malgré les
plaintes des apiculteurs, il n'existe toujours pas de réelle démarche
de lutte à grande échelle contre ce nuisible.Information exclusive. Toute reproduction interdite sans mention explicite du site Maxisciences. Source : [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]