Sciences & Environnement : Gaz de schiste, six pays à la loupe [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]L'exploitation du gaz de schiste suscite autant les convoitises qu'elle compte de détracteurs. Aux
Etats-Unis, cette énergie pourrait contribuer à elle seule à 1,1% de croissance supplémentaire en 2013 et participer à la création d'un million d'emplois, d'après un rapport du cabinet IHS Global Insight, tandis qu'avec ses réserves prometteuses, la
Pologne se
voit déjà comme la prochaine
Norvège de
l'Europe.
Mais d'autres pays, à l'instar de la France ou du Québec,
ont déjà quasiment fermé la porte à cette énergie, inquiets de l'impact environnemental des forages. Voici un état des lieux du gaz de schiste dans six pays à fort potentiel : Canada, Chine, Etats-Unis, France, Pologne et Mexique.France : une exploration bloquée [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Réserves estimées de gaz de schiste : 5 000 milliards de mètres cubesEn
France, les permis d'exploration pour le gaz de schiste, accordés en mars 2010, ont été retoqués en 2011 et sept nouvelles demandes ont été rejetées par François Hollande. Et pourtant, le pays disposerait des deuxièmes réserves de gaz de schiste en Europe, d'après l'Agence américaine de l'énergie (EIA).
"Ces décisions vont empêcher d'identifier et d'évaluer le potentiel
de nouvelles ressources énergétiques nationales, alors que la France importe 99% de sa consommation de pétrole et 98 % de sa consommation de gaz", déplore l'Union Française des Industries Pétrolières (UFIP), qui assure que la France est
"le seul pays au monde qui interdit l'emploi de la technique de fracturation hydraulique".Le gouvernement, comme la population, met en avant les risques
sanitaires et écologiques de cette technique. Dans un sondage commandé par l'association écologiste WWF en septembre 2012,
72% des Français interrogés demandent "l'interdiction définitive de l'exploration et de l'exploitation" des hydrocarbures non conventionnels.De plus, l'environnement juridique, la densité démographique et la
nature du sous-sol en France ne permettraient pas la rentabilité de la production, met en garde le cabinet d'études AT Kearney. Les coûts de production y seraient trois à quatre fois plus élevés qu'aux Etats-Unis.
Pologne : une manne inespérée [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Réserves estimées de gaz de schiste : 5 300 milliards de mètres cubesAvec les premières réserves européennes de gaz de schiste, la Pologne se rêve déjà en prochaine Norvège de l'Europe. Selon les chiffres de l'AIE, le gaz de schiste du sous-sol polonais représente
5 300 milliards de mètres cubes, soit 300 ans de la consommation du pays (
l'Institut national de géologie polonais estime lui les réserves à seulement 1 920 milliards de mètres cube).
Le pays compte investir 12,5 milliards d'euros dans cette énergie
d'ici 2020, alors que 111 licences d'exploration ont déjà été accordées à plusieurs compagnies pétrolières depuis 2007 (chiffre au 3 octobre 2012), dont
Chevron, Total, ou ConoccoPhilips. L'exploitation commerciale devrait démarrer dès 2014.
En
Pologne, le gaz de schiste est presque perçu comme écologique, dans la mesure où le pays utilise encore massivement des centrales à charbon très polluantes. Surtout
, il permettrait au pays de s'affranchir de la dépendance russe, qui compte aujourd'hui pour les deux tiers du gaz consommé dans le pays.Etats-Unis : une révolution industrielle[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Réserves estimées de gaz de schiste : 24 400 milliards de mètres cubesAux
Etats-Unis, l'exploitation du gaz de schiste à grande échelle a commencé il y a plus de 10 ans. Entre janvier 2002 et septembre 2012,
le nombre de puits horizontaux (utilisés pour la fracturation hydraulique) est passé de 69 à 1 142, d'après les chiffres du cabinet Baker Hughes.
Et d'ici 2035, le gaz de schiste représentera 49% de la production gazière américaine, prévoit l'AIE.La principale raison du développement galopant de cette énergie tient à la législation :
c'est le seul pays au monde où le code minier fait du propriétaire d'un terrain le détenteur des droits sur le sous-sol.
Ces derniers peuvent toucher jusqu'à 30% de royalties sur la production de gaz. De plus, les industriels ont largement profité de cette nouvelle manne :
"désormais quatre fois moins cher qu'en Europe, le gaz américain a permis la relocalisation de certaines activités gourmandes en énergie, comme la chimie ou l'acier", observe Jean Abiteboul, patron de l'international chez Cheniere Energy, poids lourd du courtage en gaz, dans Le Point.
Selon
un rapport de PricewaterhouseCoopers,
le gaz de schiste créera un million d'emplois dans l'industrie
manufacturière aux Etats-Unis d'ici 2025. Les opposants ont peu de chance de faire entendre leur voix face à de tels enjeux économiques.
Mais le gaz de schiste pourrait en revanche être victime de son
propre succès : en état de quasi surproduction, le prix spot du gaz aux Etats-Unis (indice Henry Hub) a été divisé par plus de 5 entre juin 2008 et juin 2012. Ce qui pourrait compromettre les investissements futurs.Chine : échange charbon contre gaz de schiste[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Réserves estimées de gaz de schiste : 36 100 milliards de mètres cubesLa Chine disposerait des premières réserves mondiales de gaz de
schiste, selon l'AIE : 36 100 milliards de mètres cubes, soit 48% de plus que les Etats-Unis. Pourtant, aucune exploitation commerciale n'a encore démarré, alors que la
Chine a importé 22% du gaz naturel consommé dans le pays en 2011. Sans compter que le pays dévore encore 4 milliards de tonnes de charbon chaque année ; le moitié de la consommation mondiale.
Avec le gaz de schiste, le pays espère donc réduire sa dépendance énergétique.
En septembre 2012, le gouvernement a pour la première fois autorisé des compagnies étrangères à participer à un appel d'offre pour 20 concessions au sud du pays. Jusqu'ici, seules les compagnies nationales étaient autorisées, mais Pékin s'est sans doute rendu compte de son manque d'expertise technique.
Le français Total s'est par exemple allié avec le chinois Sinopec pour l'occasion. D'ici 2020, la Chine vise une production de 60 milliards de mètres cube de gaz par an. Le problème, c'est que les réservoirs sont situés dans des zones
difficiles d'accès ou densément peuplées. A charge des compagnies de trouver des solutions techniques adaptées.
Mexique : suivre l'exemple américain ? [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Réserves estimées de gaz de schiste : 19 300 milliards de mètres cubes !Le Mexique importe massivement le gaz américain depuis que les prix de celui-ci ont chuté, justement en raison de l'exploitation des gaz de schiste.
Le pays, qui disposerait pourtant des quatrièmes réserves
mondiales selon l'AIE, est très en retard, notamment en raison du
monopole de la compagnie pétrolière nationale, Pemex, sur l'exploitation des réserves d'hydrocarbures. Or, la compagnie manque cruellement de moyens financiers et d'expertise technique.
"Le Mexique a besoin d'acteurs plus petits et plus flexibles pour développer sa production", juge David Shields, un expert indépendant dans la lettre Inter-American Dialogue.
Autre problème : les zones où sont situées les réserves de gaz sont pour la plupart arides ; or l'exploitation des puits nécessite de grandes quantités d'eau.
Le ministre de l'Energie vient cependant d'annoncer un investissement de 10 milliards de dollars par an pour
développer la production. Grâce à ses 9 200 kilomètres de pipeline, le Mexique bénéficie déjà des infrastructures de transport nécessaires.Canada : le grand écart [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Réserves estimées de gaz de schiste : 11 000 milliards de mètres cubesLe Canada est déjà le troisième producteur mondial de gaz naturel. Ce qui ne l'empêche pas de vouloir développer l'exploitation de son gaz de schiste, dont les réserves sont estimées à 11 000 milliards de mètres cubes, selon l'EIA. Des forages d'exploration sont en cours en
Alberta, en
Colombie britannique, au
Québec et au
Nouveau-Brunswick. A fin 2010, 107 puits avaient été forés selon
le Bureau national de l'énergie canadien, qui prévoit que 145 nouveaux puits devraient voir le jour chaque année d'ici 2035.
Mais la situation diffère selon les provinces. Si la
Colombie Britannique et l'
Alberta veulent accélérer le rythme,
le nouveau gouvernement québécois, entré en fonction en septembre, a confirmé le maintien du moratoire en vigueur depuis 2011. Selon les associations environnementales, le Québec disposerait de suffisamment de ressources renouvelables pour pouvoir se passer de gaz de schiste. 88% son électricité provient en effet des immenses barrages hydro-électriques du nord de la province.Les pays disposant des plus grosses réserves de gaz de schiste
Rang.....Pays......Réserves estimées (milliards m3)|
1 | Chine | 36 104 |
2 | Etats-Unis | 24 409 |
3 | Argentine | 21 917 |
4 | Mexique | 19 284 |
5 | Afrique du Sud | 13 734 |
6 | Canada | 10 987 |
7 | Australie | 10 449 |
8 | Libye | 8 212 |
9 | Algérie | 6 541 |
10 | Brésil | 6 400 |
11 | Pologne | 5 295 |
12 | France | 5 097 |
Source : EIA |
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