Gaz de schiste : l’enfouissement des eaux usées causerait des séismesPar Quentin Mauguit, Futura-Sciences
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Les liquides de fracturation usagés contiennent entre autres des métaux lourds, du radium 226 et du radium 228, des molécules chimiques cancérigènes et des perturbateurs endocriniens.Selon plusieurs études, les risques sismiques liés à l’exploitation des gaz de schiste, ou plutôt au stockage des eaux usées issues de cette exploitation, seraient bien réels aux États-Unis. Plusieurs exemples ont été présentés
durant la conférence automnale de l’American Geophysical Union.L’extraction des
gaz de schiste requiert d’importantes quantités d’eau, de 10.000 à 20.000 m
3 par puits, selon le
groupe Total. Elles sont utilisées, après avoir été mélangées à du
sable ainsi qu'à divers additifs chimiques, pour fracturer des couches rocheuses profondes et ainsi libérer le
gaz naturel emprisonné.
Problème : ces fluides se chargent en
métaux lourds et en particules radioactives sous terre, avant de remonter en
grande partie (entre 20 et 80 % du volume injecté) vers la surface dès la mise en exploitation des puits. Pour éviter d’avoir à les traiter, 90 % des compagnies de forage américaines auraient trouvé une solution simple : les réinjecter sous terre, pour un stockage à long terme, dans des puits dits d’injection (chiffre du
Natural Resources Defense Council, NRDC).
De vifs débats entourent cette pratique, car elle pourrait avoir un impact non négligeable sur l’environnement. Pour preuve, les
activités sismiques d’États tels que le
Colorado, l’
Oklahoma ou le
Texas auraient significativement augmenté ces dernières années. Or, l’exploitation des gaz de
schiste est en plein essor dans ces régions.
Difficile cependant d’établir un lien de cause à effet fiable. Des scientifiques de l’
US Geological Survey (USGS) et des
universités de l’Oklahoma et de
Columbia viennent cependant de fournir quelques arguments supplémentaires durant la conférence automnale de
l’American Geophysical Union. [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Les exploitations de gaz de schiste aux États-Unis, situées dans les régions colorées en rose. Les bassins sédimentaires sont figurés en rose pâle. Le stockage des eaux usées dans des puits d'injection pourrait avoir des conséquences sur l'environnement.Des épicentres à proximité de puits d’injection d'eaux usées
Depuis 2010, plus de 250
séismes ont été recensés rien qu’en Oklahoma, non sans conséquences. Environ 200 immeubles ont ainsi été endommagés par un seul
tremblement de terre de
magnitude 5,6 sur l
'échelle de Richter, survenu en novembre 2011. Ses répliques ont été suivies avec attention, l’objectif étant de cartographier le
réseau de failles en cause… mais pas seulement.
Les experts ont également cherché à comprendre comment la pression avait pu y augmenter au fur et à mesure que du liquide était injecté sous terre, parfois à moins de 500 m des
épicentres.
Le nombre de séismes présentant une magnitude supérieure à 3, seuil au-delà duquel ils sont perceptibles par l’Homme, a
continuellement augmenté dans le
Colorado et au
Nouveau-Mexique depuis 2001. Certains de ces événements géologiques ont été importants. Un
tremblement de terre a par exemple atteint une magnitude de 5,3 en 2011. Selon des calculs
de l’USGS, la probabilité que cette accélération soit naturelle serait extrêmement faible. L’injection d'eaux usées serait une nouvelle fois en cause.
Des risques sismiques à prendre en compte pour le gaz de schiste
Selon
Austin Holland de l’
Oklahoma Geological Survey (OGS), il ne fait aucun doute que le lien existe entre exploitation du gaz de schiste et séismes. Cependant, il a précisé qu’aucun changement apparent dans les activités pétrolières et gazières ne permettait d’expliquer cette augmentation
« spectaculaire » du nombre de tremblements de terre.
Dernier détail : pour la majorité de ceux qui ont été détectés
au sein de la formation géologique de
Barnett Shale, les épicentres étaient situés à moins de 3 km d’un puits d’injection, d’après
Cliff Frohlich de l’université du Texas à
Austin. Attention toutefois, cela ne signifie pas pour autant que tous les sites d’enfouissement ont causé des problèmes !
Par conséquent, les risques sismiques ne devraient plus être négligés par les autorités américaines qui délivrent les permis d’exploitation, d’autant que leur nombre est amené à fortement
augmenter à l’avenir. En effet, près de 20.000 puits de
gaz de schistedevraient voir le jour aux
États-Unis chaque année jusqu’en 2035.
L’une des solutions au problème serait simple, du moins en apparence : développer et sécuriser la filière du traitement des eaux usées, car elle est également critiquée.Source : [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]